Eaux de baignade

mis à jour le 04 janvier 2023

Tous les pays de l’union européenne sont tenus d’appliquer la directive européenne 2006/7/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 15 février 2006

Cette directive est un texte très clair et précis qui définit les règles de la surveillance et la gestion des eaux de baignade.

Pour ceux qui préfèrent les vidéos, les explications animées sont en bas de page

C’est quoi un site de baignade ?

Dans l’article premier de la directive 2006/7/CE, on trouve la définition suivante

Ainsi, ce n’est pas le maire qui décide si une plage ou une crique est un « site de baignade » que l’ARS doit surveiller. Ce n’est pas non plus le Préfet, ni l’ARS non plus, ce sont… les baigneurs eux même.

Dès lors qu’un « grand nombre de personnes se baignent » à un endroit, ( 10 par jours dans les textes d’application français ) et que le maire n’y a pas interdit la baignade, alors, il s’agit d’un site de baignade.

Qui surveille les eaux de baignade ? qui gère la plage ?

La France a choisi, pour surveiller les eaux de baignades sur son territoire, l’Agence Régionale de Santé (ARS).

C’est déjà un choix très discutable au regard de l’article premier de la directive 2006/7/CE qui dit

En effet, l’objectif premier de la directive « eau de baignade » est de « protéger et d’améliorer la qualité de l’environnement« . Et en conséquence, si la qualité de l’environnement s ‘améliore, la santé humaine s’en trouve protégée.

En confiant la surveillance à l’ARS, la France a choisi de ne s’occuper que de santé. Pour l’ARS, peu importe l’état des eaux, du moment que la santé des personnes est préservée.

En poussant jusqu’à l’absurde le raisonnement, l’ARS a tout à gagner à ce que personne n’aille se baigner. Pas de baigneur, pas de problème de santé lié à la pollution des eaux.

Il aurait été plus logique de confier cette mission de surveillance de la qualité des eaux de baignade à un organisme type OFB (office français de la biodiversité) qui s’intéresse en premier lieu à la qualité de l’environnement.

La PREB (personne responsable des eaux de baignade) est généralement le maire de la commune.

Il a pour mission de gérer la plage. Publier des arrêtés pour interdire la baignade en cas de pollution, de risque majeur de pollution … Il doit aussi, en cas de pollution, en rechercher la cause et la traiter.

Cette mission s’avère difficile à remplir quand les bassins versants des rivières qui polluent les plages s’étend sur plusieurs communes.

M.Talarmin a revendiqué, en tant que Président de la CCPI, la responsabilité des baignades dans l’aber Ildut (puisque c’est un port communautaire). Pourquoi pas, mais alors, il faudra qu’il fasse le job, la plage du Crapaud revêt tous les critères d’un site de baignade !

Que surveille-t-on exactement ?

La surveillance des eaux de baignade est basée sur des analyses d’eau à un point GPS précis. Chez nous, c’est le laboratoire agréé Labocéa qui effectue les prélèvements d’eau de mer en suivant un protocole très strict.

Avant la saison balnéaire, l’ARS détermine un calendrier de prélèvement qui ne doit être connu que le l’ARS et de Labocéa. Ce calendrier de pré-saison est le garant du caractère aléatoire des jours où les analyses sont effectuées. (pas question de ne faire des analyses seulement quand il fait beau par exemple)

Deux concentrations de bactéries sont recherchées dans les prélèvements: E.Coli et Entérocoques.

Ces deux bactéries ont été choisies car elles sont reconnues comme de très bons marqueurs de la pollution fécale des eaux. Là où l’on trouve E.Coli ou Entérocoques, il y a de forts risques de trouver d’autres miasmes des plus pathogènes (Virus divers, streptocoques etc.). On parle de bactéries témoins.

Quand surveille-t-on les eaux de baignade ? à quelle fréquence ?

La saison balnéaire, sur nos côtes, a été fixée du 15 juin au 15 septembre. Un prélèvement doit être effectué avant la saison (en mai ou juin).

Jusqu’en 2017, l’ARS effectuait 8 prélèvements par an et par plage. Depuis, elle en effectue 14 sur les plages à problèmes.

La directive 2006/7/CE n’impose qu’un minimum de 4 analyses par an.

En fait, le passage de 8 à 14 analyses par an a eu pour principal effet de diluer les pollutions dans la masse des bonnes analyses (qui dieu merci sont largement majoritaires).

Cette manœuvre a permis d’améliorer artificiellement les classements des plages.

L’ARS reconnaît ne faire 14 analyses par an que sur les plages à problèmes, les autres plages n’ont droit qu’à 8 analyses…

à Porspoder, Colons et Dames sont des plages océanes, 8 analyses suffisent, à la plage du Bourg (estuaire du Spernoc), par contre 14 analyses…. 15, mais c’est quoi cette analyse en trop en 2018 ?

Comment calcule-t-on le classement d’un site de baignade?

Le classement des eaux de baignade d’une plage se fait par un calcul statistique. On entre dans une feuille Excel toutes les analyses retenues lors des 4 dernières saisons balnéaires.

La formule du percentile 90 et du percentile 95 sont explicitées dans la directive européenne :

Ces deux valeurs permettent, par comparaison à des seuils, d’obtenir le classement

APPCL et Eau et Rivière de Bretagne ont recalculé les classements de 11 plages de la Côte des légendes.

Peut-on écarter des analyses réalisées au titre de la surveillance ?

Oui, on peut écarter des analyses révélant des pollutions du corpus d’analyses retenu pour le classement de la plage.

Mais attention !!!!! on ne peut pas retirer n’importe quelle analyse. La directive européenne a retenu 2 cas:

Les situations anormales

Les pollutions à court terme.

Ces motifs sont parfaitement définis mais ont été utilisés à tort pour écarter des pollutions chroniques liées à la pluviométrie en pays d’Iroise notamment.

Pourquoi APPCL dénonce la mauvaise application de la directive « eaux de baignade »?

Pourquoi mentir sur la qualité des eaux de baignade ?

Chaque année, aux alentours du mois de décembre, l’ARS présente le bilan des eaux de baignade des plages finistériennes au Préfet (en CODERST). Ensuite, ce bilan est rapporté sous forme de tableaux Excel à Bruxelles et un classement des pays européens est établi.

La Bretagne et plus particulièrement le pays d’Iroise font partie des cancres depuis de nombreuses années.

La directive 2006/7/CE est réellement entrée en vigueur en 2014. Elle a fixé des seuils plus restrictifs que la directive précédente. Sentant le vent de boulet, pour de nombreuses plages, certains ont décidé de se retrousser les manches… Non pas pour mettre en œuvre une politique volontariste pour améliorer réellement la qualité des eaux de baignade mais pour faire en sorte d’atténuer les effets de cette nouvelle directive.

Il est vrai que bidouiller les classement, c’est sûrement plus simple que de lutter contre les pollutions diffuses des bassins versants des rivières qui se jettent sur les plages.

Il est aussi vrai que le pays d’Iroise fait partie des territoires français où la densité d’animaux d’élevages est la plus importante. Comment faire pour ne pas froisser la profession ?

Comment ne pas impacter le secteur du tourisme qui fait vivre tant de monde ?

En trichant pardi !

Mais les grands oubliés de cette mascarade sont la santé des baigneurs et la nature que la directive est sensée protéger…

Ne pas confondre « pollution à court terme » et « pollution chronique »

Nous avons réalisé, avec les moyens du bord, une petite capsule vidéo qui explique la différence entre une pollution à court terme et une pollution chronique (voir ci-dessous)

En résumé, il est tout à fait normal de pouvoir écarter une analyse révélant une pollution bactérienne d’une plage si cette pollution est accidentelle. La surveillance de l’ARS est là pour établir un classement de la plage en situation normale. Si une tonne à lisier se renverse dans le ruisseau, juste avant la plage, cela n’a rien à voir avec une situation normale.

Par contre, si à chaque fois qu’il pleut, les eaux du ruisseau se chargent de bactéries et viennent polluer la plage, cela n’a rien d’accidentel. La pluie, quoi de plus normal ? (qui a dit surtout en Bretagne ?).

On appelle cela une pollution chronique.

La confusion entre pollution à court terme ( article 2, point 8 de la directive ) et pollution chronique a servi a écarter bon nombre de pollutions des bilans saisonniers de nos plages. En effet, la directive 2006/7/CE autorise de retirer les pollutions à court terme dans la limite de 15 % du nombre total d’analyses servant à calculer le classement ( 4 dernières années )

En gros, on ne mesurait plus la qualité des eaux de baignade mais la qualité des eaux de baignade lors des jours de beau temps… quand on a peu de chance de tomber sur une pollution. Une belle façon de casser le thermomètre en somme.

Introduire des analyses de recontrôle pour calculer les classements, c’est interdit !

Ce n’était déjà bien joli joli d’écarter des analyses révélant des pollutions des classement annuels des eaux de baignade.

C’est encore plus grave d’introduire des « analyses de recontrôle », celles qui servent à rouvrir une plage fermée.

En effet, on ne rouvre une plage fermée que lorsqu’on a obtenu une analyse de qualité au moins « suffisante ».

L’annexe IV de la directive 2006/7/CE est claire:

Extrait de l’annexe IV

Et pourtant, pendant plusieurs années, l’ARS a introduit des analyses de recontrôles à la place des pollutions écartées…

On enlève les mauvaises et on les remplace par des bonnes, les classements s’améliorent et tout le monde n’y voit que du feu… à la fin de la saison, on a notre compte d’analyses.

C’était sans compter sur notre connaissance du terrain et notre passion pour le milieu aquatique où nous passons tant de temps !

APPCL travaille sur les eaux de baignade depuis 2004 !

APPCL a rapidement compris la manœuvre et a commencé à construire des dossier dès 2016.

Un exemple pour illustrer :

Voici le bilan de l’été 2018 sur la plage de Gwisselier à landunvez, ce sont ces 14 analyses qui ont servi à calculer les classements 2019, 2020 et 2021. Noter qu’aucune pollution n’est décelée… tout est bon !

Bilan de l’été 2018 retenu par l’ARS

Et pourtant, des pollutions, il y en a eu lors de la saison 2018 sur la plage de Gwisselier…

Extrait du document obtenu grâce à l’intervention de la CADA

Noter que les pollutions du 5 juin et du 3 juillet ont été remplacées par les recontrôles du 7 juin et du 5 juillet… C’est pas bien !

Des « erreurs » comme celles là, nous en avons trouvé beaucoup sur le secteur Iroise.

Nous sommes allés naturellement voir notre grande sœur Eau et Rivières de Bretagne pour donner une dimension régionale, puis nationale et même européenne à cette affaire.

Déplacer les points de surveillance, en catimini, c’est tricher !

Les associations ont découvert, en consultant les rapportages européens de la France (trouvés dans la base de donnée nationale…) que les coordonnées GPS du point de surveillance de la plage de Penfoul avaient changé en 2018.

Personne n’en a jamais été informé et les classements de la plages se sont poursuivis comme si de rien n’était.

Or, l’ARS ne surveille plus du tout le même site de baignade !

Le point de prélèvement ARS a été déplacé, en catimini, de plus de 600m en 2018 !

Le point de mesure « Penfoul face ruisseau » était situé dans le fond de la plage de Penfoul, quand la mer atteint, à marée haute, le magnifique banc de sable fin qui fait la réputation de la plage.

C’est précisément le lieu de baignade préféré des tout petits qui y évoluent sous le regard de leurs parents, sans danger apparent.

La plage de Penfoul à marée haute en plein été 2022. La foule au niveau de l’ancien point de surveillance…
Carte postale de la plage, Éditions Jos Le Doaré. Penfoul à marée haute, les baigneurs sont dans l’eau au niveau de l’ancien point de surveillance…

Dorénavant, Labocea effectue ses prélèvements au niveau de la plage des surfeurs.

Cette manœuvre est particulièrement discutable puisque les classements ont continué à être calculés alors que l’on ne mesure plus du tout le même site de baignade.

C’est un peu comme si pour faire baisser la température d’un enfant, on décidait de mesurer celle de sa petite sœur…

Cela aura au moins eu le mérite de mettre en lumière le fait que la qualité des eaux de baignade, au niveau du spot de surf, est bien meilleure qu’au fond de Penfoul.

Alors APPCL défend l’idée simple de créer un second point de surveillance ARS. Appelons le Penfoul_surf.

On aurait ainsi une idée de la qualité des eaux de baignade du spot de surf ainsi que de celle de l’endroit où les parents font nager leurs jeunes enfants…

Et oui car en plus d’être malhonnête, ce changement de point GPS a fait peser un risque sanitaire pour les baigneurs de Penfoul. Se croyant sur une plage irréprochable, les parents ont été trompés sur les risques encourus par leurs enfants et eux même.

Quant au discours entendu 100 fois « regardez vous même, les résultats s’améliorent« … no comment !

Cette nouvelle bidouille vise une nouvelle fois à truquer les classements. Nous avons essayé de déceler d’autres plages françaises où un tel déplacement aurait été réalisé. Il s’avère qu’il y en a peu.

Ne pas rapporter à Bruxelles les résultats des pires élèves, c’est truquer les bilans français…

Dans le reportage de France3 suivant, l’ARS met en avant des plages fermées suite à 5 années consécutives en état insuffisant (Croix et Barrachou à Guisseny et Ris à Douarnenez)

Reportage de France3 sur les eaux de baignade

Certains maires choisissent de fermer leur plage durant toute la saison afin d’éviter l’humiliation suprême de la fermeture définitive suite à 5 années consécutives en classement insuffisant

Extrait de l’Article 5 de la directive 2006/7/CE

C’est le cas de la plage du Château à Landunvez ou de celle de Mazou à Porspoder.

Voici les plages de la commune de Guissény rapportées à Bruxelles par la France:

Mais où sont donc passées Croix et Barrachou ?

Voici les plages de la commune de Porspoder rapportées à Bruxelles par la France:

Mais où est passé Mazou ?

Voici les plages de la commune de Landunvez rapportées à Bruxelles par la France:

Mais où est passée la plage du Château ?

En résumé, la France ne rapporte à l’Europe que les résultats de ses plages ouvertes. Facile donc d’améliorer le classement national si tous les mauvais élèves en sont écartés…

Pourtant, les analyses de l’ARS se poursuivent pendant la fermeture des plages, dans l’optique de les rouvrir un jour.

Explications en vidéos

Eaux de baignade, le mécanisme de la fraude

Le mystère des pluies qui polluent

Pollution à court terme VS pollution chronique